Rénovation énergétique d’un monument historique : guide pour accompagner vos clients lors des travaux

Façade d'un monument historique classé à rénover

Depuis la loi Climat et Résilience, les passoires thermiques sont soumises à une obligation de travaux de rénovation énergétique. À défaut, ces logements ne pourront plus être loués par leur propriétaire. Mais qu’en est-il des logements classés ou inscrits au titre des monuments historiques ? Comment s’articulent les nouvelles exigences énergétiques avec la réglementation spécifique encadrant ces biens protégés ? Quelles aides financières envisager ? Nous vous proposons un guide dédié aux gestionnaires locatifs pour accompagner vos propriétaires dans la rénovation énergétique de leurs biens protégés.

Monument historique : quelles différences entre bien classé et bien inscrit ?

Définitions : biens classés, biens inscrits, abords

Un monument historique est un bien qui a été soit classé, soit inscrit dans le but d’en assurer sa protection du fait de son intérêt historique, patrimonial ou artistique. Temporellement, les biens concernés vont de la préhistoire au XXᵉ siècle.

Il est important de comprendre la distinction entre les biens classés et les biens inscrits, car cela influe sur les obligations qui pèsent sur le bien et son propriétaire :

  • Biens classés « monuments historiques » : ce sont des immeubles dont la conservation présente un intérêt public du point de vue de l’histoire ou de l’art. Leur niveau de protection est plus élevé que celui des biens inscrits. Le classement s’opère à un niveau national.
  • Biens inscrits « monuments historiques » : ce sont des immeubles qui présentent un intérêt historique ou artistique suffisant pour en rendre désirable la préservation, mais dont le classement n’est pas justifié immédiatement. L’inscription s’opère à un niveau régional.

La protection de ces biens s’étend à un périmètre de 500 mètres autour d’un monument historique (loi du 25 février 1943). C’est que l’on appelle les « abords ».

💡 À savoir :
Le classement ou l’inscription peut être total(e) ou partiel(le). Par exemple, une porte, une façade, une toiture, etc.

Monument historique et rénovation énergétique : quelle procédure de travaux suivre ?

Quels travaux nécessitent une autorisation ?

Travaux sur un bien classé monument historique Travaux sur un bien inscrit au titre des monuments historiques
Autorisation de travaux requise Il faut obtenir une autorisation administrative du préfet de région pour tous travaux de :

  • destruction ; 
  • déplacement ;
  • restauration, réparation ou modification. 

Ce sont tous les travaux dits de réparation, voire de restauration. 

Travaux sans autorisation Le propriétaire n’a pas besoin d’autoriser pour faire des travaux de petit entretien : maintenir le bâti en bon état et prévenir toute dégradation. Par exemple, traitement préventif d’un matériau ou remise en l’état identique d’une partie, sans modification aucune de la matière, de l’aspect, la consistance et l’agencement du bien protégé. 

Pour que ce soit un peu plus concret pour vos propriétaires, vous pouvez donner quelques exemples de travaux de rénovation énergétique qui sont souvent interdits sur des biens inscrits ou classés, car incompatible avec la préservation de l’esthétique du bâtiment, notamment :

  • L’installation de panneaux solaires photovoltaïques ;
  • Un ravalement de façade ;
  • L’installation d’une pompe à chaleur ;
  • Etc.

Ces exigences rendent ainsi la mise en conformité aux exigences énergétiques plus difficiles pour les logements protégés.

💡 À savoir :

  • Pour les travaux sur des immeubles adossés à un monument historique, susceptibles d’affecter la bonne conservation de l’immeuble classé, une autorisation d’urbanisme doit être obtenue.
  • Pour les travaux réalisés aux abords d’un monument protégé, il faut généralement obtenir l’accord préalable de l’architecte des Bâtiments de France (ABF).

Comment faire une demande de travaux selon le degré de protection du bien ?

Travaux sur un bien classé monument historique

Pour réaliser des travaux de rénovation énergétique sur un bien classé au titre des monuments historiques, le propriétaire doit impérativement obtenir une autorisation administrative.

Dans les grandes lignes, avant de pouvoir faire des travaux, le propriétaire doit :

  • Notifier la CRMH (Conservation Régionale des Monuments Historiques) des travaux qu’il compte effectuer ;
  • Cette notification ouvre une concertation avec les services de l’Etat (Drac). La consultation de la Drac permet d’obtenir un contrôle scientifique et technique en amont des travaux de rénovation énergétique ;
  • La concertation aboutit à un avant-projet définitif (ADP) ;
  • Faire une demande d’autorisation de travaux via le formulaire CERFA n°13459*0.
  • Le préfet de la région où le bien est situé, via la Drac, doit donner son accord ou son refus des travaux de rénovation énergétique dans un délai de 6 mois. Une décision d’autorisation peut être accompagnée de prescriptions ou réserves.

Attention : Pour les biens classés, le maître d’ouvrage des travaux est, en principe, le propriétaire du monument. Le maître d’ouvrage doit confier la maîtrise d’œuvre à un architecte choisi parmi les architectes en chef des monuments historiques (ACMH) ou titulaire d’un diplôme et d’une expérience équivalente. Le ministère de la Culture a mis en place un dispositif gratuit pour accompagner les propriétaires à la maîtrise d’ouvrage de travaux sur des immeubles protégés au titre des monuments historiques (classés ou inscrits). Pour cela, vous pouvez indiquer le lien suivant à vos propriétaires : https://entreprendre.service-public.fr/vosdroits/R43739.

Travaux sur un bien inscrits au titre des monuments historiques

Les biens inscrits au titre des monuments historiques sont soumis à une autorisation d’urbanisme, qui diffère selon la nature des travaux : permis de construire ou déclaration de travaux.

Les travaux suivants obligent le propriétaire à faire une demande de permis de construire :

  • Travaux de réparation ou modification ;
  • Travaux de ravalement affectant la consistance ou l’aspect de la partie protégée de l’immeuble ou compromettant sa conservation.

Les travaux non soumis au code de l’urbanisme sont soumis à déclaration préalable au titre du code du patrimoine.

En synthèse, pour faire une demande travaux, le propriétaire doit :

  • Informer la conservation régionale des monuments historiques (CRMH) à la Drac pour ouvrir une concertation avec les services de l’État, préalable aux opérations de travaux (facultatif pour un bien inscrit, mais fortement recommandé) ;
  • Réaliser une demande de permis de construire ou une déclaration préalable selon la nature des travaux ;
  • Déposer la demande en mairie de la commune où se situe le monument ;
  • La mairie transmettra, pour avis, le dossier aux autorités compétentes ;
  • La délivrance du permis ou la non-opposition à la déclaration préalable ne pourra intervenir sans l’accord du préfet de région.

Aucun critère particulier n’est exigé pour le choix de l’architecte lorsque les travaux ont été autorisés sur un bien inscrit.

Si les travaux prévoient également de démolir une partie du bien immobilier inscrit, une demande de permis de démolition doit également être déposée.

En tant que gestionnaire locatif, en tant que mandataire, vous pouvez également réaliser cette demande pour le compte du propriétaire.

💡 À savoir :

Les aides à la rénovation énergétique d’un monument historique

Le propriétaire d’un bien immobilier classé ou inscrit au titre des monuments historiques, pour assurer la conservation de son bien, peut solliciter différentes aides propres aux monuments historiques :

Des aides de l’Etat :

  • Une subvention dédiée au financement des immeubles classés ou inscrits peut être accordée au propriétaire par l’État (décidée par le préfet de région sur proposition de la Drac). Le taux de cette subvention varie selon plusieurs critères (par exemple, urgence à effectuer des travaux, disponibilité budgétaire de l’État au moment de la demande, capacité du propriétaire à contribuer au projet de travaux, participation ou non d’une collectivité locale, ouverture au public, etc.), mais aussi selon le niveau de protection du bien :
    • Si le bien est inscrit, le montant de l’aide peut atteindre 40 % du coût des travaux (hors taxes) ;
    • Si le bien est classé, le montant de l’aide peut atteindre 50 % du coût des travaux.
  • Des aides des collectivités territoriales : certaines collectivités locales peuvent attribuer des aides dont le montant dépend de la volonté locale des élus.
  • Des aides de mécènes : des entreprises, associations ou fondations peuvent aider les particuliers à conserver leurs biens inscrits ou classés et obtenir en contrepartie des déductions fiscales.

À ces aides peuvent s’ajouter les aides propres à la rénovation énergétique classique, sous conditions de ressources, notamment :

  • MaPrimeRénov’ ;
  • les Certificats d’économies d’énergie (CEE) ;
  • la TVA à taux réduit ;
  • etc.

Liste des aides à la rénovation énergétique

En tant que gestionnaire immobilier, il peut être judicieux d’accompagner vos clients dans les travaux de rénovation énergétique et les demandes de subventions, qui sont très complexes et chronophages pour les biens protégés. C’est un bon moyen de fidéliser vos clients qui possèdent un patrimoine d’exception.

Les dérogations à l’obligation de rénovation énergétique des monuments historiques

Le décret n°2022-510 du 8 avril 2022, pris pour l’application des articles L. 111-1 et L. 126-32 du code de la construction et de l’habitation, est venu compléter la loi Climat et Résilience, afin de prendre en compte les spécificités des certains bâtiments.

Ce décret précise dans quels cas certains bâtiments peuvent, par exception, être considérés comme ayant fait l’objet d’une rénovation énergétique performante.

Pour rappel, le critère de performance, supposant notamment l’atteinte de la classe A ou B du diagnostic de performance énergétique (DPE), est important puisque l’attribution d’aides financières en dépend.
Ce décret a créé un nouvel article R. 112-18 dans le code de la construction et de l’habitation prévoyant que l’exception s’applique lorsque :

  • La rénovation énergétique entraînerait des modifications de l’état des parties extérieures ou des éléments d’architecture et de décoration de la construction, en contradiction avec les règles et prescriptions prévues pour :
    • les monuments historiques classés ou inscrits ;
    • les sites patrimoniaux remarquables ;
    • les abords des monuments historiques ;
    • l’immeuble ou un ensemble architectural ayant reçu le label « architecture contemporaine remarquable » ;
    • les sites inscrits ou classés mentionnés au titre du Code de l’environnement.
  • Le coût des travaux excéderait 50 % de la valeur vénale du bien, évaluée par un professionnel dans le domaine de l’immobilier, car le coût serait manifestement disproportionné.

Dans le cadre de ces exceptions, une rénovation énergétique pourra être considérée comme performante pour les bâtiments qui :

  • en raison de leurs contraintes techniques, architecturales ou patrimoniales ou des coûts manifestement disproportionnés par rapport à la valeur du bien, ne peuvent pas faire l’objet de travaux de rénovation énergétique permettant d’atteindre un niveau de performance au moins égal à celui de la classe B. À condition toutefois que la rénovation permette de gagner au moins 2 classes au DPE ;
  • pour les bâtiments de classe F ou G avant travaux, lorsqu’ils atteignent au moins la classe C après travaux et que les six postes de travaux de rénovation énergétique ont été traités (l’isolation des murs, l’isolation des planchers bas, l’isolation de la toiture, le remplacement des menuiseries extérieures, la ventilation, la production de chauffage et d’eau chaude sanitaire ainsi que les interfaces associées).

Depuis la loi Climat et Résilience, tout logement considéré comme une passoire thermique sera progressivement interdit à la mise en location. Toutefois, si le logement est classé ou inscrit et que les travaux de rénovation énergétique modifieraient significativement son architecture, le bien échappe à l’interdiction de location. Certains de vos clients seront exemptés de travaux lorsque ceux-ci portent atteinte à l’architecture du bâtiment. D’autres devront se mettre en conformité, mais les démarches à réaliser seront plus longues et complexes que pour un bien classique. Pour aider vos propriétaires à se mettre en conformité avec la loi Climat et Résilience, communiquez-leur les dates clés pour leur permettre d’anticiper les différents échelons. Vous pouvez vous aider de notre calendrier de la rénovation énergétique.

Article réalisé avec Héloïse Fougeray

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