Comme nous sommes déjà nombreux à le savoir et comme vous avez pu le comprendre à la lecture de l’article sur la grille de vétusté, l’application de la vétusté est en enjeu assez majeur de la location et notamment du traitement du dépôt de garantie lors de la sortie d’un locataire. En effet, avec le coefficient de vétusté, il permet de rendre les choses plus « justes » afin que le locataire n’ait pas à payer l’usure normale du bien. Notamment lorsque celle-ci n’a pas été provoquée par son utilisation, mais par l’utilisation par le locataire précédent ou par le propriétaire lui-même, dans le cadre d’une mise en location de l’ancienne résidence principale.
Ce principe est largement admis et toléré tant par les bailleurs que par les locataires.
La vétusté, et donc le coefficient de vétusté vont permettre d’effectuer une retenue sur le dépôt de garantie plus juste afin que les bailleurs ne profitent pas de la situation pour tout faire repeindre aux frais du locataire. L’idée est ici de faire participer le locataire à la réparation des dégradations commises en s’approchant de leur juste valeur.
À titre d’introduction sur ce sujet, nous pouvons également parler des indemnités forfaitaires.
Ce sont des retenues forfaitaires (non basées sur un devis ou une facture) qui sont légalement pratiquées par les bailleurs sociaux mais théoriquement interdites en location de parc privé.
Cependant, elles restent tolérées en cas d’accord du propriétaire et du locataire.
ATTENTION
accord écrit pour ne pas prendre de risque pour vous !
L’indemnité forfaitaire a également l’objectif de rendre les choses justes. En effet, en théorie si un mur d’une faible superficie dispose de 3 ou 4 trous, le propriétaire est en droit de demander la repeinte du mur au locataire et de retenir la somme correspondante suivant facture ou devis. Cela peut facilement monter à 300€ pour 4 trous car il y a systématiquement un forfait déplacement. Dans ce cas, une indemnité forfaitaire dont le montant est arrêté en accord avec le locataire et le propriétaire peut être une solution juste pour que l’un soit quand même « puni » d’avoir effectué des trous, sans pour autant être pénalisé fortement.
Rappel sur la vétusté
Comme dit dans notre article sur la grille de vétusté, la vétusté est définie dans le décret n°2016-382 du 30 mars 2016 (fixant les modalités d’établissement de l’état des lieux et prise en compte de la vétusté des logements) comme étant : « La vétusté est définie comme l’état d’usure ou de détérioration résultant du temps ou de l’usage normal des matériaux et éléments d’équipement dont est constitué le logement ». Ainsi vous l’aurez compris, vétusté et usure normale sont étroitement liés, si ce n’est identiques.
Vous n’êtes pas sans savoir, que les revêtements et équipements de tout logement, qu’ils soient loués ou occupés par le propriétaire, ont une durée de vie théorique (bien entendu celle-ci peut variée suivant comment on s’en occupe). La vétusté va donc être cette détérioration intervenant normalement avec le temps.
Définition du coefficient de vétusté
Avec le principe de vétusté vient le coefficient de vétusté. Celui-ci va représenter la valeur perdue par le revêtement ou équipement par année. Ainsi, un coefficient de vétusté de 15%/an signifie qu’une table à 1 000€ en 2018 vaut aujourd’hui en 2022 4 fois 15% de moins (4 années à 15% par an) soit une décote de 60% (donc la table est aujourd’hui estimée à 400€). Cela va fortement se rapprocher du principe de décote des véhicules qui perdent en valeur au fur et à mesure des années.
Ce coefficient de vétusté ne va pas être la seule notion intéressante. Nous avons également la notion de franchise de vétusté.
La franchise de vétusté est la période pendant laquelle on va considérer que le revêtement ou équipement ne perd pas de valeur.
Admettons notre table à 1 000€ en 2018 avec franchise de vétusté de 2 ans. Dans ce cas, elle ne perd que 30% de sa valeur (2 années sans vétusté + 2 années avec une vétusté de 15% par an) et est donc estimée ce jour à 700€ au lieu de 400€ comme dans notre exemple précédent.
Enfin, nous allons retrouver une autre notion intéressante, la notion de valeur résiduelle.
Les personnes réalisant de la comptabilité de groupe savent déjà ce qu’est cette notion mais nous allons ici l’expliquer. Si nous suivons notre logique de perte de 15% de sa valeur par an pour un bien, cela fait qu’au bout de moins de 7 années, notre table vaudrait 0€. Or, comme vous le savez tous, il est rare que les choses soient sans valeur, gratuites. On va donc pouvoir considérer que, lorsque la durée de vie de l’équipement est dépassée mais qu’il est encore utilisable, il peut avoir une valeur résiduelle.
Le taux de valeur résiduelle peut varier suivant les grilles de vétusté (voir être complètement absent) mais va généralement se situer entre 5 et 15% de la valeur initiale de l’équipement (ou revêtement bien entendu).
La valeur résiduelle permet d’établir également un tableau de dépréciation des biens comme ces exemples ci dessous :
Il s’agit d’une notion qui n’est absolument pas obligatoire dans les grilles de vétusté tout comme la franchise de vétusté ! C’est ici au bon vouloir des organismes établissant ces grilles (généralement les bailleurs sociaux ou groupements de bailleurs sociaux.
Comment s’applique la vétusté ?
Comme indiqué dans notre article précédent, la vétusté va s’appliquer sur les factures de remise en état d’un équipement. Nous pouvons également retrouver cette notion dans les expertises d’assurance (en cas de sinistre dégât des eaux par exemple, les peintures, a part si elles sont neuves, ne sont jamais remboursées à la valeur du devis de remise en état mais un coefficient de vétusté est appliqué afin que le propriétaire ne puisse pas s’enrichir d’un sinistre).
Pour appliquer la vétusté, il faut bien entendu avoir un chiffrage. Que ce soit un devis ou une facture, vous pouvez effectuer des retenues sur le dépôt de garantie au moyen d’un devis sans obligation de travaux ou via une facture de travaux.
Le calcul de vétusté va alors s’appliquer sur le montant de remise en état de ce devis/facture en prenant en compte le nombre d’années écoulées entre la dernière remise en état et ce jour.
Prenons un logement refait intégralement en 2012, dont le locataire Monsieur Y a été locataire de janvier 2019 à nos jours. À sa sortie, vous devez refaire le séjour pour 1 000€. Il faut appliquer la vétusté à compter de 2012 et non à compter de 2019 !
En effet, la peinture commence à perdre de sa valeur lorsqu’elle a été posée et non lorsque monsieur Y a commencé à occuper le logement. Il faut donc compter le nombre d’années passées entre la dernière remise en état et le devis sur lequel nous voulons appliquer le coefficient de vétusté.
Ensuite, il faut vous référer à la grille de vétusté présente dans votre bail ou, même lorsqu’elle est absente du bail, une grille de vétusté d’un office HLM de votre région car les commissions de conciliation ne tolèrent pas la non-application d’un taux de vétusté.
Regardez le coefficient de vétusté qui sera, admettons 10% par an. Ici 10% multiplié par 10 années, cela nous fait une vétusté à 100%, donc aucune retenue possible sur le dépôt de garantie du locataire.
Il faut donc également bien faire attention si la grille comporte une valeur résiduelle.
Dans ce cas, dès que la durée de vie d’un équipement ou revêtement sera dépassé, vous n’aurez pas besoin de vous référer au coefficient de vétusté mais simplement appliquer directement le coefficient de valeur résiduelle sur le devis (toujours pour 1 000€ si la valeur résiduelle est indiquée comme étant de 10%, il faut simplement faire 1 000€ x 10% soit 100€ refacturables au locataire).
Comment calculer la vétusté du mobilier ?
Une question cruciale ! Afin d’y répondre, nous distinguons plusieurs catégories de biens mobiliers :
- à savoir les meubles dits meubles meublants (lits, armoires, tables, canapé etc…),
- l’électroménager (car nous le savons, ceux-ci ont une obsolescence programmée et ne sont plus fait pour résister aux vents et marées),
- mais aussi le linge de maison (nous pensons ici au cas de locations meublées ou, nous vous le rappelons, vous devez fournir le linge de lit notamment, les rideaux etc..).
Les meubles meublants
Les meubles meublants sont simplement les « gros » meubles de votre maison meublante, habillant votre pièce.
Nous pouvons y retrouver :
- les lits,
- armoires,
- tables,
- chaises,
- canapés,
- fauteuils,
- etc…
Ils ont généralement une durée de vie plus longue qui se situe entre 5 et 8 ans. Le choix dans cette fourchette n’est pas encadré.
BON À SAVOIR
Nous pouvons cependant vous conseiller de vous référer aux coefficients appliqués par les assurances habitation qui sont habituées à cela et ont donc des grilles (que vous devez normalement pouvoir obtenir assez facilement sur simple demande), mais également à la fiscalité et notamment à la notion d’amortissement.
L’électroménager
Ici, la durée de vie est considérée comme étant moindre par rapport aux meubles meublants. L'obsolescence programmée, mais également les évolutions technologiques font que vos biens électroménagers perdent plus rapidement de leur valeur.
Prenons l’exemple très simple d’un ordinateur pour le calcul de vétusté du matériel. Celui-ci est considéré par l’administration fiscale comme amortissable sur 3 ans (à traduire que le coefficient de vétusté est de 33.3% par an).
Cela peut paraître très rapide, car un ordinateur peut très bien fonctionner même après 3 ans mais cela se justifie par le fait que pour acheter un ordinateur disposant des mêmes performances que le défectueux, l’investissement aura fortement baissé.
Le linge de maison
Ici la vétusté est encore plus rapide ! Non seulement ce sont des choses utilisées très régulièrement et donc qui s’usent plus vite, mais il y a également la notion de mode à prendre en compte.
BON À SAVOIR
Il est donc conseillé de fournir le moins de linge possible (le minimum légal) et laisser les locataires amener leurs rideaux, leurs serviettes, leur décoration en somme afin que vous puissiez, en tant que gestionnaire représentant de votre bailleur, dormir sur vos deux oreilles.
Article rédigé par Thibault BREMENT, gestionnaire locatif institutionnel